-- guns in the summertime.

oo1/ ton père c'est un idéaliste, un rêveur, un imprévisible. Tout ou rien mais rien à moitié alors il faut foncer. Un jour il a pris une gitane dans ses filets et a sacrifié son cœur aux charmes de la déesse des lunes, il lui a tout donné oubliant les dangers qu'il y avait à s'éprendre d'une telle créature, se laissant bercer par la voix enchanteresse de sa Némésis. Il s'est passé huit années avant qu'il ne réalise le mauvais œil que lui avait apporté cette trouvaille et, tout en gardant les cadeaux qu'elle lui avait fait, il décida de la remettre aux vents. C'est en tout en cas la version à laquelle toi et tes pairs avez toujours eu droit, en grandissant t'as accepté finalement de ne rien savoir d'autre puisque tu sentais ton paternel si peu disposé à livrer ses secrets. Du reste tu l'as appris en lisant entre les lignes et en demandant à d'autres de combler les trous. oo2/ ta mère elle, était bien trop belle pour être aimante, c'est pourquoi elle détruisait tout ce qu'elle touchait, sans réellement s'en apercevoir et le comprendre. T'as toujours cherché à lui trouver mille excuses pour l'abandon brutal dont vous furent victime, arrachés à ce bienheureux fantasme pour être élevés dans un foyer monoparental. T'en as voulu si fort à ton père de te priver d'elle, et puis t'as réalisé, que tout ce temps elle savait parfaitement où vous étiez et que c'était son choix de se deviner un instinct maternel par intermittence. oo3/ il y a vous, et il y a les autres. C'est sibyllin mais la différence existe bel est bien. Ancrée si profondément qu'elle finit par tirailler sous la peau, vivant tapis entre les phalanges, au fond du regard serpentin, planquée dans la cage thoracique. « They're not us. » c'est ce qu'elle répétait sans cesse ta grandma. Ça a fini par rentrer, pas s'installer, creuser le gouffre qui te séparait de l'ordinaire si paisible de l'autre côté de la grille. Ton clan est exceptionnel. Dans le sens littéral du terme. Vous n'êtes pas comme n'importe qui. Madame Lambda ou Mr. Tout le monde sont les stricts opposés de ta famille. La volonté de ne surtout pas ressembler à la majorité que vous méprisez de façon presque imperceptible. Commun des mortels qui n'a a vos yeux perçants qu'un intérêt moindre, une bêtise en surdose pour un ennui quantifiable. Parce qu'il ne faut pas laisser à autrui la moindre faiblesse à laquelle s'accrocher, leur laisser croire ce qu'ils ont envie de croire tout en maîtrisant le reflet présenté. Ainsi on vous a éduqué à cultiver cette différence pour laquelle vous étiez pointés du doigt, implantant dans vos jolies têtes brunes qu'il y a eux et vous. Eux. Ces ordinaires, ce monde de démago où l'on vous apprend les choses à l'envers. Ne pas suivre, ne pas les écouter, ne pas leur ressembler. Ne surtout pas faire partie de la majorité, du système, de la norme. Vous finirez par être tondus et vidés de votre douce âme... à vivre guidé inconsciemment sur le chemin du cercueil en paille. oo4/ ainsi, t'as jamais eu d'explications pour le rejet parental, autre que l'égocentrisme qui avait toujours fait d'eux ces figures inatteignables. L'une fantomatique, l'autre idéalisée. Ces étrangers de l'autre rive. Qui s'aimaient trop fort pour s'aimer correctement. Un tandem de Sid et Nancy qui vous plaçaient spectateurs de leur drame permanent, y'avait jamais eu de place pour une tierce. C'est ce que vous étiez fatalement. Résultat c'est auprès de ta fratrie tout aussi paumée que toi que t'as cherché des réponses, tu ne les as eu que partiellement mais t'as compris alors qu'ils étaient tout comme toi, gamins-jouets laissés aux bons soins de leur indépendance précoce, tu t'es accrochée à eux parce qu'ils ne te regardaient pas avec les défauts de l'un ou de l'autre, ils t'acceptaient toute entière avec des cicatrices semblables aux leurs. oo5/ t'as grandi dans le mouvement constant, l'agitation, le bruit, des projets qui s'enchaînent, des débats animés et des querelles tumultueuses. C'est pour ça que tu détestes te poser, même un instant. T'as cette science-là qui rend toutes les connaissances humaines bien dérisoires quand on y a goûté ne serait-ce qu’une seule fois, transforme le corps en volute pensive et l’âme en ogre débauché. Tu prolonges la vie en taquinant la mort, t'aimes conduire de main de maître ton corps au bord d’un précipice que tu te laisses goûter avant de t’y jeter... Partir sur un coup de tête et revenir sur un coup d'audace, prendre des décisions irréfléchies, dire oui, et non, et peut-être. Sans cesse sur le fil. Plus haut, plus vite, plus loin, plus longtemps. Tu vis comme une toupie de chair et de sang, ton équilibre ne se maintient qu'en mouvement. Tout ce qui est familier, quotidien, prévisible a à tes yeux quelque chose de très fade, presque ennuyeux. oo6/ ce qui explique sans doute ton attachement sans failles à ta belle-famille. T'es tombée sur les Wolf, ou plutôt ils te sont tombés dessus, comme une supernova en plein gueule. Les antipodes qui se rencontrent et se percutent pour ne faire plus qu'un, le goût du risque t'a poussé à flirter avec l'impensable et tu te retrouves désormais mains et poings liés, éreintée par l'entreprise tout en te rassasiant de l'appartenance. Parce que tu sais pas vivre dans un rétroviseur. Tu vas chercher la vie où elle se trouve. En avant. Et pas faire le tri. Tout prendre. Avec appétit. Sans rougir. oo7/ de manière générale tu as un faible pour les causes perdues, les animaux errants au sens propre comme au sens figuré. Tu es empathique mais tu le caches bien, t'as tendance à croire que dès qu'autrui sait qu'il compte aux yeux de quelqu'un il se met à en profiter, ton affection est bien vivace et réelle mais imperceptible, tu as des priorités. Tu ne l'avoueras jamais mais t'aimes les cas désespérés, t'as besoin qu'on ait besoin de toi. Tu sors les gens du caniveau, les remets sur les railles et dès qu'ils s'en sortent par eux-même tu pars à la recherche de ton prochain paumé. Schéma que tu répètes sans arrêt sans le réaliser vraiment. Les gens normaux, totalement saints et parfaitement équilibrés ça n'évoque chez toi pas le moindre intérêt. oo8/ t'es pareil en amour. Surtout en amour. Tu marches pas au coup de coeur, au coup de foudre, au coup de cul. Non toi tu fonctionnes à l'aura qui aimante, au mystère de l'attraction la plus brute. Tu ne veux pas d'un homme, pas d'un amant, mais quelqu'un capable de lire jusqu'à ton âme et de s'y retrouver prisonnier volontaire. un partenaire. un égal. le sexe ne te suffit pas, l'amour mièvre, chevaleresque te mortifie. T'as besoin de plus. Tu l'as reconnu tout de suite, Jake, l'homme violent, incertain et taré. Justement, vos démons ne sont pas les mêmes mais sa folie s'accorde avec la tienne. T'as su, qu'il serait à toi qu'il était à toi. Même s'il s'endort dans d'autres draps. Même s'il te donne envie de lui exploser la tronche à coup de batte de baseball. Parce que tu le respires Jake, et même quand tu le détestes tu l'aimes encore. oo9/ tu n'as pas ta langue dans ta poche et ça peut surprendre la première fois, qu'un si petit bout de femme puisse perdre si rapidement son sang-froid, hurler si fort et jurer comme un charretier. Tu prends les mêmes droits que ces messieurs et parfois leurs manières. Femme dans un environnement a priori hostile pour avoir droit au chapitre t'as appris à parler au-dessus de leur voix et à utiliser leur langage. Il serait cependant imprudent de croire que tu ne sais jouer de tes atouts féminins pour parvenir à tes fins. Tu peux faire preuve d'une démarche chaloupée, de sensualité dans la voix, de charme dans ta gestuelle puisque tu connais si bien les faiblesses du sexe opposé. Mais tu hais ces mâles, qui parce que tu es une femme séduisante, refusent de t'accorder le moindre gramme de cervelle. Ces hommes qui, quand tu es libre de ton corps, que tu les regardes sans rougir, font tout pour te détruire. T'es persuadée, au fond, que les hommes détestent les femmes. Ils ne supportent pas qu'elles soient, ne serait-ce qu'une minute, plus intelligentes, plus libres, plus raffinées qu'eux. o1o/ un peu trop extrême tu sais difficilement faire dans la maîtrise et la convenance. Lorsque tu es furieuse, tu l'es en rouge, en pourpre et en grenat, et n'y vas pas en douceur. Tu aimes avec la moindre parcelle de ton cœur ou hais avec toutes les fibres de ton corps. Ta souffrance est viscérale, tes peurs obsessionnelles, ta possessivité démesurée. Jouant tantôt des sentiments de chacun, tu prends parfois plaisir dans le malaise d'autrui, tu n'es jamais sincère sauf envers les tiens, ta dévotion envers tes proches est sans limite, sans barrières, tu vis par eux, pour eux, ils sont tout ce que tu possèdes et tout ce que tu chéries. Malgré le cynisme et des répliques assassines, t'es une tragédienne qui s'assume, une dur à cuir mais avec une certaine part de fragilité, cabossée et marquée par un parcours douloureux mais une guerrière, pas d'apitoiement excessif.

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